HISTOIRE LOCALE
FIGURES HENDAYAISES DU PASSÉ
Cette rubrique est destinée à présenter des habitants qui auront marqué la vie de leur quartier et de la ville pour avoir été des personnages hauts en couleurs et/ou particulièrement exemplaires.
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Le présent portrait est consacré à Simone Chrisostome-Vilalta, hendayaise du Bas-Quartier, qui s'illustra par son courage et sa témérité au cours de l'occupation de notre pays par l'Allemagne nazie.
Simone Chrisostome-Vilalta
1923 - 2021
Par Christian Rivière
Simone Chrisostome-Vilalta, hendayaise de naissance et de cœur qui aura comme aucune autre femme marqué par son indéfectible courage civique la sombre période qu'a connue notre ville pendant l'occupation allemande, vient de nous quitter dans les premières heures de cette nouvelle année 2021. Elle était âgée de 97 ans.
Une jeunesse dont l'exemplarité éveille le respect
Engagée dès la fin de son adolescence contre la propagation de l'idéologie nazie dont on devinait déjà les contours avec l'arrivée au pouvoir d'un général factieux dénommé Franco en Espagne, puis l'invasion de notre pays par la terrifiante armée du Troisième Reich, Simone Chrisostome, future épouse Vilalta (conjoint qui aura comme elle connu l'atrocité des camps de déportation), entra en résistance au sein du noyau de citoyens insoumis qui se constitua dès le lendemain de l'arrivée des troupes d'occupation sur Hendaye. Nous étions alors à la fin de l'été de l'année 1940 et Simone n"avait pas encore tout à fait atteint sa dix-septième année.
Notre future héroïne s'initia dès lors à son rôle de résistante à partir du domicile familial situé au Bas-Quartier. C'est là que s'organisa, sous l'égide de son père soutenu par quelques familles hendayaises dont les noms sont cités dans les témoignages et documents rapportés en annexe, la distribution de tracts appelant à la "Résistance" et que se nouèrent les prises de contacts avec des groupes régionaux essentiellement liés à la mouvance communiste. Simone sera ainsi très vite occupée à discrètement tracter ces appels ainsi qu'à convoyer de faux papiers qui attribuaient une nouvelle identité à ceux qui refusaient de se soumettre.
Après deux années de cette activité clandestine qui mena plusieurs fois la Gestapo à perquisitionner le domicile de sa famille, Simone rejoignit ensuite en tant qu'agent de liaison les rangs du réseau de résistance "Angers, honneur et patrie" qu'anima son père en terroir angevin. Ce réseau scinda son activité en plusieurs groupes autonomes : renseignement, sabotage, évasion, propagande, poste (avec pour mission l'interception des lettres de dénonciations) et compta jusqu'à 296 membres qui furent confrontés à la violence de la répression nazie qui se solda par 107 arrestations ainsi que 49 déportations (dont celle de Simone) entre septembre 1943 et février 1944.
Confrontée au monde concentrationnaire où seule la solidarité comptait pour survivre
Simone sera arrêtée le 2 août 1943 à Angers, soit peu de mois avant sa vingtième année, puis incarcérée dans cette même ville avant d'être ensuite internée au Fort de Romainville et finalement transportée dans un wagon à bestiaux vers le camp de concentration de Ravensbrück situé à 80 km au nord de Berlin et dans lequel, sur les quelques 132 000 femmes et enfants qui y furent déportés, 90 000 furent assassinés. Simone subira dans cet enfer concentrationnaire un rude et périlleux internement qui ne prendra fin qu'à la veille de la capitulation du IIIe Reich le 8 mai 1945, démontrant ainsi que les sévices imposés aux déportés par ce régime honni parvenaient difficilement à être qualifiés tellement leur cruauté était ineffable.
Confrontée en ce sinistre lieu d'internement à d'insupportables astreintes physiques, des violences démesurées ainsi qu'à une disette savamment imposée, Simone reviendra profondément amaigrie et psychiquement marquée à tout jamais par cette indescriptible expérience dans laquelle les détenues démontrèrent, malgré leurs épouvantables conditions de détention, une extraordinaire solidarité entre elles. Elle considérera dès lors qu'un devoir impérieux s'imposait à chacune de ces anciennes déportées : celui de témoigner, sans relâche, à quel point la nature du monde concentrationnaire nazi pouvait avoir un caractère profondément inhumain et démentiel.
Un legs fait de souvenirs admiratifs et indélébiles
Passée du stade de l'ex-détenue à celui de l'héroïne, Simone ira inlassablement témoigner, aussi longtemps que ses jambes lui permirent encore de se déplacer, devant des générations d'écoliers et étudiants en passe de devenir adultes. Elle dénoncera inlassablement devant ces derniers les méfaits qu'engendrèrent le nationalisme exacerbé et les discours haineux d'un psychopathe dénommé Hitler sur l'Allemagne d'alors qu'il dirigeait avec une poigne de fer .
En dévoilant ainsi devant nos générations montantes son incroyable lucidité ainsi que son admirable humanisme qui devenait particulièrement émouvant lorsqu'elle exprimait pouvoir pardonner à ceux qui furent subjugués puis asservis par leur "Führer", notre regrettée amie démontrera qu'elle possédait une singulière et attachante personnalité.
Simone nous manquera immensément, mais son exceptionnel engagement demeurera à tout jamais gravé dans nos mémoires et aura utilement contribué à perpétuer le souvenir de l'horreur que fut le monde concentrationnaire nazi.
Témoignages et documents édités en hommage à "Monette"
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Témoignage de Simone Chrisostome-Vilalata
Réalisation :
La Amical de Mauthausen y otros campos
&
L'Amicale française de Mauthausen et ses camps annexes
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Entrevue avec Simone Chisostome-Vilalta
initiée et réalisée par :
OROITZA - Cercle de Recherches sur l'Histoire de Hendaye
http://www.oroitza-histoire-d-hendaye.fr/#Deportations
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Le camp de Ravensbrück, des rescapées témoignent : https://www.ina.fr/contenus-editoriaux/articles-editoriaux/le-camp-de-concentration-de-ravensbrueck-des-rescapees-temoignent/
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Documents photographiques
Tenue de déportée de Simone sur laquelle repose un calepin illustré intitulé "À ma petite Monette, pour ses 21 ans". Celui-ci a été confectionné avec les moyens de fortune du camp par une codétenue qui a consigné son parcours de vie sur quelques feuillets.
Séjour de délassement des anciens déportés hendayais aux Aldudes, (été 1945). De gauche à droite : Louis Rivière, Paul Gastesi, Réné Peyrelongue, François Pastor, Simone Chrisostome, Martin Mir.